lundi 18 janvier 2016

"Textes d'ateliers d'écriture", par Paul-Eric Langevin (2003-2007)

Ateliers d’écriture

Textes de Paul-Eric Langevin

2003-2007



Thèmes: la peur, la chaleur, les illusions, l'avenir, la peur, la mort, l'orage, oser, le départ, la douceur, carpe diem, la solitude, le respect, la confiance, l'amour, le changement, la liberté, vivre, la colère, la solitude, la préférence, la montagne, l'absence



La peur

(courage, foi, luxe, pudeur, artiste, prestige, peur)

Pour triompher de la peur, que la force soit avec toi ! Ca c’était pour la musique. Peur rime avec cœur, avec douleur et avec pleurs. Peur est la sœur de frayeur et la mère de malheur. Elle est parente avec l’erreur et avec la mauvaise humeur. Remplis ton cœur de bonheur et de fraîcheur et tu ne connaîtras pas la peur. Celle qui vient à petits pas, qui commence à vous titiller, c’est l’angoisse. Mais l’angoisse n’a rien à offrir d’autre qu’elle-même, elle se suffit à elle-même. Alors pour s’en détourner on s’accroche à un objet, à un nounours, à une porte, à un visage, à une situation. Alors on a peur. J’ai peur de ceci ou cela. Oui mais pourquoi ? Ca paraît tout bête, absurde. Oh c’est juste une angoisse. Mais certains ont plus d’angoisses que d’autres. Certains sont plus peureux que d’autres. Et lorsque la peur est omniprésente, là c’est la panique. Dans la foule, dans une pièce vide, la panique peut faire irruption. Après la fatigue, la panique ; après la peur intense, la panique. Que faire ? Tout semble sans issue. Sans solution. Le cerveau est à bout. Réfléchir ne sert plus, on réagit instinctivement, mais mal. Résultat, des erreurs, des bêtises, des catastrophes parfois. La panique ça peut avoir des conséquences catastrophiques. J’ai été élevé dans une famille très angoissée. Mon père était un grand angoissé, ma mère est une grande angoissée, ma grand-mère maternelle est une grande angoissée. Mon oncle aussi. Cette façon négative, mauvaise, mal appropriée de voir la vie me poursuit. J’ai essayé de suivre les conseils du livre qui s’appelle « Tremblez mais osez ». Depuis un certain temps déjà, j’essaie d’aller de l’avant en surmontant ma peur. Mais toute cette peur, cette angoisse, est finalement inutile. Je voudrais ne pas être comme cela. Sans doute est-ce que je dois simplement apprendre à m’accepter. A accepter les changements, à m’apaiser. Rapports entre désir et angoisse. Arriver à gérer ses désirs.  Pour qu’ils ne partent pas dans tous les sens, qu’ils trouvent un objet. Il m’est arrivé de faire une crise d’agoraphobie dans la rue par un beau temps ensoleillé alors que toutes les jeunes filles étaient en fleur et plus ou moins dévêtues. Ca peut prêter à rire. Mais je n’arrive pas à voir la sexualité de façon apaisée pour l’instant. Soit je ne la vis pas du tout et l’expérience de la frustration est extrêmement dure. Soit c’est un trop plein, une passion physique et là c’est trop. Je voudrais être plus serein par rapport à tout cela. Gérer mon désir. Gérer ma peur. Gérer mes fantasmes. M’accepter moi-même.

«Comprendre l’origine de ses peurs permet de les connaître»



La chaleur

(désir, victoire, humour, valeur, chaleur, affection)

La chaleur de l’amour, la chaleur du foyer, échanges d’énergie continuels qui régissent l’univers ainsi que nos vies, La chaleur de l’été, la chaleur de ton corps, la chaleur d’être aimé, la chaleur rend plus fort, la chaleur peut brûler, la chaleur donne la mort, la chaleur peut sauver, la chaleur est un trésor, la chaleur dans les prés, la chaleur encore et encore…



Les illusions

Dans la vie, on a souvent beaucoup de projets, de choses à accomplir, et pour les mener à bout, on a besoin de croyances, d’illusions. Ces illusions sont nécessaires pour avancer, pour faire quelque chose de vrai. L’illusion, c’est le mystère. L’illusion, c’est aussi ce qui est invisible, caché, ça se rattache au secret. L’illusion, après coup, c’est le regret, la déception, le remords, la culpabilité, l’échec. Car ça n’était que des illusions. Il y a aussi un côté un peu psychotique dans l’illusion. Les psychotiques sont parfois dans un autre monde, le monde de l’imagination. C’est une protection contre les difficultés de la vie. Une protection qui peut devenir un danger. L’illusion, je pense au film Matrix et à toutes ces fictions qui décrivent des mondes multiples. Il ne faut pas trop avoir d’illusions. Mais certaines sont nécessaires. C’est un sujet très subjectif. C’est la personne qui perçoit l’illusion. Illusion, rêve, cauchemar, vie, mort, mystère, chance…



L’avenir

(solitude, joli, paranoïa, fraternité, avenir, automne)

Les lendemains qui chantent.
A l’avenir, je voudrais changer, je voudrais aimer. A l’avenir, je voudrais rencontrer des gens, d’autres gens, que je ne connais pas, rester ouvert aux autres. A l’avenir, je voudrais créer, inventer, construire ma vie jour après jour, Je souhaiterais que mes proches n’aient pas trop de soucis. Je souhaiterais que chacun travaille à essayer de changer, d’aller mieux, de mieux s’entendre avec les autres. J’ai lu une fois que le monde était une symphonie dans laquelle chacun joue mal sa partition. Essayons de jouer moins faux tous ensemble. Bon, tout ça est très idélaliste. En réalité, on prend tous plaisir à se disputer, à s’en vouloir, à se rendre malades les uns les autres, à faire du mal. Rien ne changera vraiment radicalement. Mais les plus grands changements, on les fait jour après jour. Inquiétons-nous pour des sujets qui en valent la peine. Le climat, la pollution, la santé et la pauvreté des autres. Si on ne se donne pas tous la main, on va tous à la catastrophe dans les vingt, cinquante ou cent prochaines années.

«L’avenir n’appartient à personne.»

«Sur certaines choses, nous attendons l’avenir.»

«L’avenir se prépare.»

«Mange car tu ne sais pas qui te mangera demain.»

"La femme est l’avenir de l’homme."

«L’avenir sourit aux audacieux.»

«Laissons l’avenir venir.»

«Demain, il fera jour.»



La peur (juin 2004)

(tendresse, fantaisie, parole, peur, naissance)

Peur : peur d’avancer, peur de vivre, peur de mourir, peur de parler, peur d’aimer. J’ai les jetons, j’ai la trouille, j’ai peur, je suis inquiet, je me fais de la bile, les mains qui tremblent, les yeux écarquillés, la bouche ouverte, les jambes flageolantes, le cœur qui s’affole. Beaucoup de mots, d’expressions pour décrire l’indescriptible. Ce que l’on ne comprend pas. Mais il faut distinguer la peur de l’angoisse. La peur est peur de l’objet. L’angoisse est sans objet. Sans affronter nos peurs, nous ne pouvons aller bien loin. La peur ne nous quitte pas tant que nous évoluons. Ressentir la peur, c’est savoir qu’on est en vie. De quoi avons-nous peur ? En général, j’ai peur de moi-même. De ne pas être à la hauteur, de flancher, de rester trop seul, de reproduire mes erreurs passées. Mais c’est grâce à cette peur que je peux avancer, que je peux aller vers les autres, que je peux tendre vers la nouveauté, vers ce que je désire. Le désir et la peur : deux faces de la même pièce. Tout ce dont on a peur, c’est ce que l’on désire sans vouloir l’accepter soi-même. Lorsque l’on doit parler devant tout le monde, on a peur mais on se lance et on dépasse ses peurs. Cette semaine, j’ai assisté à deux débats dont un débat philosophique. J’avais peur de parler mais j’ai proposé un sujet et il a été choisi. Lors du deuxième, je n’ai pas parlé, ce qui ne me permet pas d’en déduire quoi que ce soit sur moi puisque je n’ai rien essayé. Je termine avec des citations. 

«Quand il y a deux, il y a peur».

«J’ai survécu à bien des catastrophes qui n’ont jamais eu lieu.»

«Un passage obligé.»

«Une peur transversale.»

«Les autres en ont peut-être besoin.»

«Arrive sans être invitée.» 

"J'y vais-t-y, j’y vais-t-y pas ?"

«A la vie, à la mort.»

«Lorsque nous sommes dans l’inaction.»

«La prendre à la racine.»



La Mort  (mai 2004)

(La mort, la confiance, la transmission, la création, l’odeur)

La mort et la vie sont les deux faces d’une même pièce. Pour aimer la vie, aimons la mort. Parler de la mort permet de parler de la vie. Il y a quelques semaines, sur les conseils de Télérama, j’ai été visiter le cimetière du Père-Lachaise. Je ne pensais pas y découvrir ce que j’y ai découvert. Les tombes de gens célèbres comme Marcel Proust ou La Fontaine mais surtout les monuments dédiés aux victimes des guerres de colonisation de la France et ceux dédiés aux victimes de la déportation dans les camps nazis : les camps de la mort. Ce qui m’a particulièrement frappé, c’est l’incapacité que l’on semble avoir à donner un sens à cette souffrance, à représenter la mort. Le long d’une allée entière, il y a de nombreuses statues toutes plus hallucinantes les unes que les autres. Je crois que face à la souffrance et à la mort, l’homme a besoin de sens, de signification, de symboles. 

Lorsque j’ai perdu mon père, ce qui m’a fait le plus mal, c’est de ne pas savoir en parler. Car un jour il est là, et l’autre jour il n’est plus là. En réalité, il était malade. J’ai dû partir en vacances pour être mis à l’écart de la souffrance, et lorsque je suis revenu, il n’était plus. Comment donner un sens à cela ? C’est ce que chacun, à travers les pertes, les deuils, les séparations, doit essayer de trouver pour pouvoir continuer à vivre. Parce que la vie ne vaut rien mais rien ne vaut la vie, comme disait Alain Souchon.

La difficulté, c’est de pouvoir parler. Comme le disent les survivants des camps, parler est impossible, se taire est interdit. Sans vouloir comparer aucune blessure, ce qui n’a aucun sens, il est essentiel de trouver la forme, artistique, littéraire, ou autre, par laquelle on peut passer pour ne pas tomber dans l’oubli. C’est le cinéaste Wong Kar Wai que j’ai vu interviewé à Cannes récemment qui disait que lorsqu’on oublie les souvenirs, on ne fait que s’en rappeler et qu’il est nécessaire que les souvenirs eux-mêmes nous oublient pour aller de l’avant.



L’orage  (avril 2005)

L’orage, ça me fait penser à tous les sentiments douloureux que l’on peut ressentir, alors qu’on voudrait que ce soit plus calme, on a envie de plénitude. Plus on se cache au fond de son lit, sous son oreiller, plus on a peur de l’orage. Mais la vie, c’est l’orage. Il n’y a pas de vie sans orage. Sans bouleversements, sans difficultés. On a besoin de courage chaque jour pour les affronter. Et quand l’orage est terminé, on essaie de réparer les dégâts. Construire. Mais on a toujours l’orage en mémoire. Alors de temps en temps, il ressort des profondeurs du cœur. Il ne faut pas en avoir peur. Laisser passer l’orage.



Oser  (février 2005)

(Oser, le respect, les petits bonheurs, deviens ce que tu es par Nietzsche)

C’est une de mes principales difficultés, j’ai du mal à oser. J’ai un livre qui s’appelle «Tremblez mais osez». Je n’ai pas beaucoup réussi à l’appliquer. Oser franchir le pas, oser plonger, oser parler à quelqu’un, oser être heureux, oser vivre son désir, oser aimer. Moins j’ose, moins j’essaie d’oser. Le monde se rapetisse alors pour moi, les rêves semblent inaccessibles. Et puis dès que je commence à oser, alors je recommence à m’apprécier, à me dire que finalement eh bien je pourrai faire des choses extraordinaires, formidables. Je construis des châteaux en Espagne. Qui s’effondrent petit à petit parce qu’ils sont trop grands, pas assez solides. Ou bien tout d’un coup parce que dans mon imaginaire, le rêve se transforme soudain en angoisse. Perpétuellement dans l’entre-deux, j’accepte difficilement l’échec et me laisse emporter par la réussite. Il faut être humble, la vie est une promenade de montagne.



Le départ (février 2005)

Le départ dans la vie, le départ en vacances, le départ en voyage, le départ car les dés sont jetés alors le dé part. Partir c’est mourir un peu. Quand on part, on va ailleurs parce qu’on espère que ce sera mieux, en fait c’est pour reprendre les choses à zéro mais les difficultés ne seront pas forcément moins nombreuses. Arriverons-nous à les affronter un peu mieux ? Il ne faut pas non plus se créer des difficultés. Le départ, ça peut être vu de deux façons. Départ signifie quitter, laisser derrière soi, voire se séparer de, mais le départ, c’est aussi continuer la route, recommencer, partir pour essayer de faire quelque chose ailleurs, en mieux, en moins bien ? Nul n’est parfait. Quand on essaie de tirer un grand trait sur le passé, il ne peut s’empêcher de vous rattraper, c’est le retour du refoulé, paraît-il. Alors que faire ? Est-ce désespéré ? Peut-être mais on peut essayer de croire même si l’espoir est faible. Croire de toute son âme que ce sera mieux après. Qu’on aura la force de construire et de faire taire cette voix intérieure qui a envie de tout détruire, pas la faire taire mais savoir l’utiliser à bon escient. Partir, c’est laisser derrière soi et ne pas se retourner, pas comme dans l’histoire d’Orphée. Orphée s’est retourné et Eurydice est redescendue aux enfers. Partir, c’est affronter ses peurs, toutes ses peurs. Le départ, c’est l’espoir, c’est le courage, c’est la vie.



La douceur  (mars 2005)

(humour, solitude, regret, rage, empathie, douceur)

La douceur de vivre, la dolce vita. Une douceur, ça peut être un gâteau. Pour aller bien, il est nécessaire d’être doux avec soi-même. Douceur rime avec douleur, douceur rime avec couleur. Quand on a été dans la douleur, on a besoin de douceur. Quand on arrive à recevoir la douceur, on peut apprécier toutes les couleurs. La douceur, c’est le contraire de la fermeté. Parfois, on a besoin de douceur. Et parfois de fermeté. Quand je pense douceur, je pense : un lit tout neuf, un bonbon, un compliment, un sourire, un paysage harmonieux, un chat en train de dormir, serrer quelqu’un dans ses bras, se coucher dans l’herbe. Un peu de douceur dans un monde de brutes. Une main de fer dans un gant de velours. Douce nuit d’amour. La douceur de la lessive. Stop.

«La douceur angevine.»



Carpe diem (avril 2005)

Profiter du jour présent.
Profiter de la pluie qui tombe sur mon visage.
Profiter du soleil qui réchauffe ma peau.
Profiter de ton sourire.
Profiter de la tarte que je déguste avec plaisir.
Profiter du contact de mon corps avec l’herbe fraîche.
Profiter malgré tout, malgré ton absence.
Profiter de chaque jour comme si c’était le dernier.
Profiter de tous, de chacun, car ils ont tous quelque chose à m’offrir.
Profiter malgré la culpabilité, malgré la tristesse.
Profiter n’est pas toujours facile.
Profiter, on n’en a plus envie parfois.
Profiter, on ne sait plus ce que ça veut dire parfois.
Profiter jusqu’au dernier instant.
Profiter de toi pour l’éternité.
Profiter du ciel bleu avant les nuages.
Profiter, c’est aimer, c’est sourire, c’est rire.
Profiter, c’est faire profiter les autres.
Profiter des souvenirs.

«Vis aujourd’hui comme si tu allais mourir demain.
Vis demain comme si tu allais vivre l’éternité.» (Proverbe arabe)



La solitude  (juin 2006)

(sensualité, solitude, mort, silence, courage)

Un écrivain à succès disait que la solitude était un «cercueil de verre». L’homme est seul, par essence, me racontait un peintre de mes amis. La solitude dans la grande ville. Hier, au déjeuner, deux personnes âgées découvraient qu’elles étaient voisines, elles auraient pu le remarquer avant. Mais j’aime aussi cette phrase philosophique sur la grande ville : «mobile amas de poussière humaine.» Toute ma vie, j’ai essayé de lutter contre la solitude. Mon caractère me pousse à l’introspection et à l’intériorité et c’est une véritable lutte quotidienne que de savoir aller vers l’autre, pour chacun de nous bien sûr. J’avais à un moment un voisin à l’accent méditerranéen dont je devais supporter les appels téléphoniques. Supporter l’autre, l’enfer c’est les autres. Bon j’arrête les citations, je dois essayer de penser un peu par moi-même. La voisine de l’autre côté avait réussi à se persuader que j’étais entré dans sa chambre lors de son absence. Sûrement un délire paranoïaque, un désir inconscient de me rencontrer peut-être. Le résultat, c’est que j’ai dû me justifier au poste de police le plus proche pour affirmer que je n’avais pas profité de l’intimité de cette charmante voisine. La solitude est une lutte. Pour qu’elle ne soit plus un cercueil de verre. Pour que les uns aillent vers les autres. Mais malgré tous mes efforts dans des associations de quartier, d’étudiants, d’étudiants étrangers, dans les soirées estudiantines, j’en viens souvent à un constat amer. Chacun vit dans son petit coin, bien content de ses petites affaires et dans une grande indifférence par rapport à l’autre, bien souvent. Si souvent. Jalousie, mesquinerie, orgueil, indifférence, tout cela est aussi le propre de l’homme. La solitude, c’est celle ressentie par l’enfant qui ne s’amuse pas avec les autres. La solitude, c’est celle de l’enfant en deuil du père et qui ne sait pas tellement bien ce qu’est la mort. C’est aussi la solitude face à la maladie, la solitude face au quotidien, la solitude comme refuge, comme protection, la solitude dans un jardin secret puis dans une tour d’ivoire. Comment redescendre de cette tour d’ivoire ? La solitude face aux choix essentiels de la vie. Le doute dans la solitude, la solitude face au doute. L’envie de percer cette solitude qui nous apaise puis qui nous étouffe. La solitude du passant qui arpente les rues en quête d’une âme sœur, d’une réponse, d’un peu de chaleur. Et puis le pire, le plus noir de tout, l’enfermement dans la solitude, de façon aigrie. Caliméro : «C’est trop injuste». La solitude en tant que gouffre. En tant qu’épreuve. La solitude de l’orgueilleux qui préfère être seul que mal accompagné. Celle de la personne âgée qui souhaiterait voir ses proches mais ne voit défiler que des soignants qui pompent dans les caisses. La solitude face aux épreuves, les grandes et les petites, face au quotidien. Et puis la grande solitude, la solitude métaphysique de l’homme face à la nature, face aux questions essentielles de l’existence, y a-t-il quelque chose plutôt que rien ?



Le respect  (juin 2006)

(injustice, estime de soi, dépression, peinture, lecture, fuite, respect)

Respect de soi, respect des autres. Y a-t-il du respect dans le monde ? Hier, un homme m’a vendu une carte dont l’argent était reversé aux personnes en difficulté. Sur cette carte, une grosse femme boulimique et triste mangeant une énorme glace était côte à côte avec un petit garçon africain mort de faim et d’aridité. Certes, le respect existe, mais comme beaucoup de choses, c’est un idéal et un idéal ne peut être réalisé jusqu’au bout, de façon constante. Un temps, il y a le respect, l’autre l’irrespect. Romulus et Remus étaient frères, ils ont pourtant fini par se tuer l’un l’autre. Le respect, c’est déjà ne pas penser que l’autre est inférieur à soi-même ou que l’on est inférieur à l’autre. Beau programme. En théorie, c’est bien mais que faire des inégalités sociales, financières, économiques, politiques, psychologiques ? On respecte l’autre mais jusqu’à un certain point. Par exemple, lorsque l’autre est trop malade, on ne peut que se protéger soi-même pour éviter de souffrir. Le pire, c’est que certains trouvent du plaisir à se faire souffrir ou à faire souffrir l’autre. Dans ce cas, aucun respect possible. Alors que reste-t-il ? Encore un peu de respect ? On ne peut pas respecter les autres si on ne se respecte pas soi-même. Mais au fond de nous tous, une part est faite d’irrespect, de protection de soi au détriment de l’autre. Se respecter, c’est se préparer de bons petits plaisirs, essayer d’avoir de bonnes relations avec les autres. En fait, le respect est une voie qui mène au bonheur. Le bonheur est un idéal lui aussi. En se respectant soi-même et en respectant les autres, on peut travailler à son propre bonheur mais chacun en a un bien à lui. Tout est subjectif dans ce domaine. Tout n’est pas constructif. Tant de choses sont destructrices. L’idéalisme ne mène nulle part sans travail, sans souffrance, sans sueur au front, sans moments de crise profonde. 

«Ne pas se trahir.»

«Accepter les individus contrastés»

«Chaque jour est une lutte pour ouvrir les yeux sur le monde»

«Une volonté, un cheminement, de la reconnaissance» 



La confiance  (juin 2006)

Confiance rime avec chance. Confiance rime avec méfiance. Et puis aussi avec confidence. La confiance en soi permet la confiance en l’autre. La confiance en l’autre donne la confiance en soi. La confiance en soi évolue au cours de la vie, en bien comme en mal. Lorsqu’on avance, on a de plus en plus confiance. Quand on baisse les bras, on a de moins en moins confiance. La confiance permet de soulever des montagnes. La méfiance amène les gens à s’entretuer pour un rien. La méfiance amène à la paranoïa. La confiance est une force pour aller vers la vie. Confiance et silence, confiance et danse, confiance et balance, confiance et absence, confiance et présence. Se fier, se défier, méfiance, confiance, la méfiance est un cercle vicieux, la confiance est un cercle vertueux.



L’amour  (septembre 2006)

(beau, amour, accident, oiseau, aide)

On continue sur le chemin en pensant à l’amour, ce que nous recherchons tous sans pour autant trouver toujours celui qui nous convient. Certaines rencontres, certaines personnes, certaines histoires poussent à croire encore en l’amour malgré les échecs, les deuils, les passages difficiles. Mais il est bien clair que certaines amours sont néfastes, qu’elles mènent parfois à la destruction. Alors il faut choisir, qui plus est bien choisir. On s’invente des choses fantastiques que l’on pourrait réaliser grâce à l’amour. Parfois, les illusions tombent. Elles se défont d’elles-mêmes car trop de doute. L’amour est difficile à construire, difficile à entretenir. Parfois cela ne dure qu’un instant ou qu’une certaine période. Quelques heures, quelques jours, quelques mois, quelques années, ou même toute la vie. Comment choisir ? Simplement vivre. Il y a l’amour qui provoque la rédemption et celui qui provoque la mort. A la fin de mon adolescence, j’ai vécu une histoire très forte avec une femme japonaise qui avait deux fois mon âge. Beaucoup de douleur, beaucoup de fragilité. Les gens s’aiment parfois tout en dépassant les difficultés. Mais assez souvent, ils se détruisent les uns les autres. On peut penser à Fanny Ardant et Gérard Depardieu dans «la Femme d’à côté» de François Truffaut. «Ni avec toi ni sans toi», lui souffle-t-elle avant de se suicider avec lui. Mais l’amour peut aussi sauver, heureusement. Cependant, on ne peut prévoir quelle est l’issue de l’histoire. «L’homme n’a pas qu’une seule vie, il en a plusieurs à vivre les unes à la suite des autres, c’est ce qui fait son malheur», disait Châteaubriand. Alors on répète les histoires d’amour inlassablement, parfois ça n’apporte rien. Parfois ça apporte quelque chose. Je crois que j’ai peur de l’amour, assez souvent. L’amour : on ne fait que remplacer ? 



Le changement (octobre 2006)

(changement, doute, laideur, pauvreté)

La vie défile, la Terre tourne et tout change, évolue, progresse, apparaît, disparaît. Accepter les changements, c’est parfois très difficile mais si on arrive à les vivre positivement, alors on apprécie mieux la vie. Accepter de perdre, accepter de changer, accepter les autres dans ce qui est différent de soi-même.  «Plus les choses changent, plus elles restent les mêmes», disent certains. Parfois, on est bousculés, on ne peut plus faire face, on laisse les choses défiler sans plus rien comprendre. Et puis on recommence à danser dans la grande valse de la vie. Encore, de nouveau, on tourne, on tourne. Le changement, c’est voisin de la crise. Toute crise implique un changement. Plus ou moins. Parfois, c’est le doute. Aller dans quelle direction ? Changer comment ? Faire ses choix, c’est obligatoire. Tous les jours, à chaque instant de la vie, on doit choisir. Choisir de changer ceci, de ne pas changer cela. On est parfois bouleversés, parfois renforcés.



La liberté (octobre 2006)

(joie, petits bonheurs, laideur, vie, liberté, sentiment)

«Liberté j’écris ton nom» (poème de Paul Eluard sur la liberté)

Il n’y a pas de liberté s’il n’y a pas de contraintes. La liberté a quelque chose d’enivrant et quelque chose d’effrayant. Elle est intéressante si elle mène à la créativité. Il y a la liberté physique et la liberté morale. La liberté physique est celle que le prisonnier a perdu. La liberté morale est plus abstraite. C’est celle qui mène à la dépendance si on la perd. Des hommes se sont battus pour gagner la liberté que l’on a aujourd’hui. La liberté qui mène à l’indépendance est un combat de tous les jours. Le chemin vers soi est parfois long et difficile.



Vivre  (octobre 2006)

(réunion, espoir, vivre, persévérance)

Vivre, c’est espérer. C’est avancer, malgré les embuches, malgré tout. C’est faire avec. Composer avec ses propres talents et ses propres tares. «Le vent se lève, il faut tenter de vivre», disait Paul Valéry dans le poème «Le cimetière marin». Alors malgré le vent, on continue, on marche. Parfois on s’assoit sur le côté parce qu’on n’y arrive plus. Parfois la mélancolie est difficilement supportable. Et puis on repart sur d’autres chemins, vers d’autres buts. Avec courage. Le courage n’est pas toujours là. Mais on redémarre. Jusqu’à la fin.



La colère  (octobre 2006)

(attention, colère, précieux, boulimie, égoïsme, jalousie)

La colère doit être extériorisée par un moyen ou par un autre. On espère souvent que ce soit fait sans nuire à autrui ni à soi-même. Si elle ne sort pas, elle peut effectivement nuire à autrui ou à soi-même. L’image que l’on peut donner est celle de la cocotte-minute. Si elle est fermée, ce qui est à l’intérieur n’espère qu’une chose, c’est sortir. Je ne sais pas toujours exprimer ma colère. La colère est souvent liée de façon plus ou moins nette avec la frustration. 



La solitude (décembre 2006)

L’homme est-il toujours seul ? Face aux difficultés, bien que les autres soient souvent un soutien, chacun est seul face à soi-même pour trouver les ressources pour continuer. On doit trouver la force en soi, sinon on risque d’être dirigés par d’autres et de perdre son libre-arbitre. Dans la société moderne, il semble qu’on soit plus seuls que jamais bien qu’on soit entourés de ses voisins, que bien souvent on ne connaît pas, avec lesquels on se querelle parfois. La lutte est dure, cruelle, on doit la mener toute sa vie pour sa liberté, ses droits, son épanouissement, dans une société toujours plus rapide, plus épuisante, plus dure, plus fatigante. Des voitures, des bus, des trains bondés, toujours plus de pollution et d’embouteillages. On se retrouve souvent seul dans sa voiture, dans son bus, dans son train. Se motiver, continuer à se motiver malgré la solitude, le découragement, continuer à chercher les amis, les copains, la famille, tous ces liens qui nous permettent de lutter contre cette solitude. Parfois la solitude est présente même lorsque l’on est à deux, elle est parfois présente même dans le couple. 

«Solitude je te hais, que Dieu dans son immense bonté, me préserve de toi et de tes méfaits» (Pierre)

«Nous préférons nous cacher que nous dévoiler aux autres» (Marie)

«Un seul être vous manque et tout est dépeuplé» (Lamartine)

«Il vaut mieux être fous à plusieurs que sage tout seul» (Gabriel Garcia Marquez) 



La préférence (décembre 2006)

J’ai parfois beaucoup de mal à établir mes préférences. Il m’arrive de ne pas arriver à choisir. Cela fait partie de mon caractère. Mais lorsque je prends sur moi pour prendre des décisions, ne pas tarder à les prendre, j’arrive à dompter ce défaut et à choisir entre un gâteau et un autre, entre un film et un autre. De même pour les choix plus importants. Il paraît qu’il faut prendre au sérieux les choses futiles et ne pas prendre au sérieux les choses importantes. Les préférences, c’est tout ce que l’on aime, tout ce qui fait notre personnalité. Les goûts prononcés pour certaines choses, les petits bonheurs préférés, les sorties, les choix, allant du plus simple au plus compliqué. C’est ce qui fait que je suis moi et pas un autre, ce qui fait que nous sommes uniques tous autant que nous sommes. C’est cette unicité qui fait notre beauté, notre beauté à tous, les petits riens qui font notre propre unicité. Garder ses goûts, ses préférences, ce que l’on aime, c’est parfois difficile dans une société qui veut nous dicter nos choix, nos goûts et faire de nous des consommateurs, voire parfois des zombies. Il est très important de conserver ses préférences, même si elles évoluent au fil du temps qui passe.



La montagne  (avril 2007)

(perfection, montagne, bien, artiste, pudeur, absurde, découragement)

La montagne, c’est un de mes plus beaux souvenirs d’enfance. La montagne, c’est le cheminement de la vie. On monte, on monte, on sue, on respire, on s’essouffle. On peste face à tout ce qui reste à parcourir. On écoute les bruits alentour. On s’imprègne de l’atmosphère. On marche petit à petit. A côté des autres. On pense aux beaux paysages que l’on va découvrir. C’était un jour d’orage. Nous redescendions rapidement. Pour arriver à l’hôtel avant la tempête. Il pleuvait à grosses gouttes. J’étais sur les épaules de mon père. Ma mère courait à côté de lui. Elle m’a longtemps rappelé cette anecdote, de sorte que je m’en souviens assez bien, pas très clairement mais un peu. L’angoisse de la montagne, sa taille imposante, comment l’homme peut-il avoir raison de ces géants ? L’angoisse du gouffre. On est si peu de choses, face à la nature. Des fourmis, des brebis. De l’humilité. Les hommes devraient toujours avoir à l’esprit l’humilité face à la nature. J’adore le roman «Frankenstein» de Mary Shelley. Et ses descriptions de la montagne. J’adore la montagne. Manger un fruit en montagne, boire une gorgée d’eau, tout cela a un meilleur goût que les meilleurs restaurants. Récemment, j’ai relu «Tintin au Tibet». C’est le plus beau Tintin. Je suis un amoureux de la montagne. 

«Si vous n’aimez pas la montagne, si vous n’aimez pas la campagne, si vous n’aimez pas la mer, allez vous faire foutre» (Jean-Paul Belmondo dans «A bout de Souffle») 



L’absence  (avril 2007)

(rencontrer, dessin, liberté, absence, lecture)

Mais tu n’es pas là, et si je reste tant pis…, comme dit la chanson. Si tu n’es pas là, je suis triste, je suis sans voix, sans inspiration, sans énergie, sans cœur. Si tu n’es pas là, je ne vais pas bien, je ne suis pas dans mes baskets, je ne suis pas en forme, je suis dans mes pensées et je t’attends, je t’attends sans fin et je pense, je pense à toi, difficilement car je voudrais ta présence. Ton absence est comme un manque, ton sourire n’est plus là, ta voix, ta joie de vivre. Je suis en moi et je t’attends car je voudrais être avec toi, je voudrais que tu sois toujours là pour que je sois calme, gai, gentil avec toi. C’est difficile de t’attendre. C’est difficile de ne pas te voir. C’est difficile d’accepter ton absence car je souhaiterais ta présence tout le temps. Ta présence est un baume qui me donne de la joie dans le cœur. L’absence de l’autre vide de substance et transforme le monde en grisaille. Paradoxalement, on ne peut vivre toujours avec l’autre, dans la fusion continuelle. Il faut s’habituer à l’absence pour mieux apprécier la présence. Elle est d’autant plus délicieuse que l’absence est longue et dure. Chacun a la capacité de manquer dans le cœur de quelqu’un d’autre. C’est ce qui fait que chaque personne est essentielle au déroulement des évènements. L’absence ronge et l’on se prend à penser que l’autre est bien ailleurs, mieux qu’ici, s’amuse et prend du plaisir sans soi. Jalousie quand tu nous tiens. Puis enfin, on pense que l’autre est dans un monde meilleur. C’est l’absence finale. J’eus souhaité que mon père soit avec moi pour mon adolescence et pour m’accompagner dans l’âge adulte mais je n’ai pas eu cette chance et j’ai dû composer sans, ce qui ne m’a pas empêché de réaliser beaucoup de choses. Mon père, où que tu sois, je t’aime et je souffre de ton absence. 


Participation à des ateliers d’écriture animés par Jean-Pierre Maume et Sophie Fabius-Rey (2003-2007)


Merci pour leur présence à Thomas, Marie, Christine, Marie-France, Marie-Christine, Philippe, Bénédicte, Jean-Paul, Laure, Hervé, Alain, Francine, Olivia, Béatrice, Florence, Alison, Renée, Sophie, Jean-Pierre.















Maison et cabane de Boris Vian à Ville-d'Avray

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