Syntaxe formelle et syntaxe comparée
Anne Abeillé
Présentation de l’article "L'acquisition des énoncés elliptiques en anglais" de Jonathan Ginzburg et Dimitra Kolliakou (2009)
I - Introduction
NSU : énonciation dont il manque un constituant (la plupart du temps verbal). On inclut dans les NSU les « réponses courtes (short answers) » et les énoncés de reprise utilisés pour reconnaître ou pour clarifier des énoncés.
L'acquisition du langage est souvent vue comme un processus d'augmentation de la longueur des énoncés par les enfants alors qu'une chose commune chez les adultes (compétence de l'adulte) est l'habilité d'utiliser des short énoncés quand le contexte le permet.
L'étude : l'émergence de certaines classes de NSU dans le langage des enfants (corpus de Manchester : corpus CHILDES).
Principale étude : the LATE SHORT QUERY EFFECT, les NSQ (queries) sont acquises plus tardivement que les NSA (answers) bien que les enfants soient mis dans un contexte où l'utilisation est courante (des adultes les utilisent fréquemment en leur présence pour l'étude et font en sorte qu'ils puissent les utiliser).
Période où l'enfant produit des phrases interrogatives, des déclaratives elliptiques et les lexèmes polaires oui et non, les NSQ sont absents.
L'étude porte sur des enfants entre 2/3 ans et elle s'est faite pour 2 langues : pour des enfants Grecs et des enfants Anglais
Résultats : montrer comment modéliser cet effet dans une approche construction orientée Dialogue dans lesquels les NSU sont soit des mots grammaticaux soit des constructions dont le prédicat principal est un paramètre contextuel + résultats sont problématiques pour les analyses de NSU en termes de mécanisme unique, généralisé de réduction phonologique + esquisse d'explication pour l'ordre d'acquisition des NSU : notion qui combine l'accessibilité des paramètres contextuels et la complexité de la construction de contenu.
Toutes les études sur l'acquisition du langage montrent l'importance du contexte dans lequel l'enfant est exposé mais peu d'études sur les NSU fournissent des analyses syntaxiques et sémantiques du phénomène.
II - La distribution des constructions NSU chez les adultes Anglais et les explications grammaticales possibles
Les NSU chez les adultes en dialogue
Fernandez et Ginzburg (2002) classification : 15 classes de NSU
la majorité des classes NSU utilisent l'interrogation et la réponse (5 classes) : l'émergence des NSU concerne ces 5 classes
1- Réponses Affirmative et Rejection (41%) / Plain et Repeated => question polaire et réponses aux assertions
A: Did Bo leave? B : Yes / No
/ repeated = Bo, yes plain = mmmh...
2- Short answer (38%) => réponses elliptiques à des wh-questions
who left ? Bo.
3-Clarification Ellipsis / CE (16%) => utiliser pour clarifier une énonciation qui n'a pas été entièrement comprise
3-Clarification Ellipsis / CE (16%) => utiliser pour clarifier une énonciation qui n'a pas été entièrement comprise
A: Did Bo leave? B: Bo ?
4- Sluicing (5%) 33% en tout de questions wh-interrogatives
A: Someone left? B: Who?
-->Direct sluicing : l'antécédent de la sluice est compris sans difficulté
-->Reprise sluice : ne comprend pas certains aspects
de l'énonciation alors que le locuteur savait
-->Repetition sluice : la sluice est utilisée pour
demander une répétition de l'énonciation précédente dans son ensemble.
Comme les sluicing les CE sont ambigus entre 2 lectures :
-la lecture confirmation clausale : exemple : « 3 tu veux dire ? »
-la lecture constituant attendu :
exemple : « que veux-tu dire par ? »
Explication des NSU : avec ou sans construction
–
théories qui suivent l'ancienne route :
théories unitaires pour lesquelles la résolution elliptique est avec un seul,
typique mécanisme extra-grammatical.
–
Théories qui suivent la route plus
tardive : théories constructionnistes pour lesquelles les NSU sont
incorporées dans la grammaire comme des constructions distinctes.
Dans la 1ere approche : underlying sententialism : les NSU sluicing et short answers sont analysées comme sous-jacentes des constructions SENTENTIAL
HOU approche : the higher-order unification pour VP elliptique
Dans la 1ere approche : underlying sententialism : les NSU sluicing et short answers sont analysées comme sous-jacentes des constructions SENTENTIAL
HOU approche : the higher-order unification pour VP elliptique
– alternative aux approches unitaires : approche DIALOGUE-ORIENTED CONSTRUCTIONISM : les NSU sont des mots grammaticaux (yes, no, pardon) ou des constructions (short answer, sluicing) où la composition sémantique est d'abord conduite par le contexte plutôt que par la syntaxe.
III- Description des résultats concernant l'acquisition des NSU basé sur le corpus Manchester (enfants anglais)
Une asymétrie dans l'acquisition des NSU
-NSU des 2/3 ans = étude d'enfants anglais corpus Childes, 12 enfants locuteurs anglais (lesquels c'est la seule langue), activités avec leur mère et enregistrements 2 fois chaque 3 semaines : transcription de 4 enfants
→ évidence que les short answers ont été acquises par les 4 enfants
→ ¾ montrent une préférence à l'utilisation des NSU
sentential answers
→ tous les sujets utilisent productivement les questions,
prioritairement les wh-questions (what et where acquis en début d'expérience)
→ pour les ¾ des sujets, les NSQ (sluicing et CE) sont
pratiquement absents alors que toutes les mères utilisent de manière productive
les NSQ.
2 Généralisations à l'émergence des NSU
2 Généralisations à l'émergence des NSU
- généralisation empirique 1 et 2
1 : short answers et les interrogatives acquises, les NSQ (sluicing et CE) sont dans l'ensemble absents
1 : short answers et les interrogatives acquises, les NSQ (sluicing et CE) sont dans l'ensemble absents
2 :NSQ présents dans le discours des adultes
IV – Discussion sur des possibles explications pragmatiques sur ce corpus / explications qui n'expliquent pas entièrement l'effet observé / brèves explications pour le corpus Grec qui donnent à peu près les mêmes résultats que le corpus anglais
IV – Discussion sur des possibles explications pragmatiques sur ce corpus / explications qui n'expliquent pas entièrement l'effet observé / brèves explications pour le corpus Grec qui donnent à peu près les mêmes résultats que le corpus anglais
Utilisation de plusieurs corpus : Aran, Becky, Carl, Dominic répondant aux questions de leur propre mère et parfois aux questions d’un chercheur
Etablissement de statistiques sur les résultats donnés par les corpus
Tableaux détaillés à expliquer : tableaux 9 à 12
Résultats test du chi deux, test de Fisher, données sur les probabilités
Comparaison avec les données établies avec les enfants grecs et leurs mères (corpus CHILDES)
Mairi, Mairi et sa
mère : résultats donnés dans les tableaux 13 et 14
Deux explications sont possibles à l’établissement de l’effet réponses courtes tardives (late short query effect) : pragmatique ou mécaniste.
Deux explications sont possibles à l’établissement de l’effet réponses courtes tardives (late short query effect) : pragmatique ou mécaniste.
Explication pragmatique : deux raisons données pour l’absence de NSQ (non sentential queries ou questions non verbales)
-contextuelle
-désirabilité sémantique
Explication mécaniste :
absence de compétence linguistique ou conversationnelle appropriée
(14) Contexte: les enfants maitrisent-ils le rôle du contexte dans la production des NSQ ? Production des NSQ dans un contexte donné
(15) Désirabilité sémantique : Les enfants saisissent-ils le sens des NSQ ? Arrivent-ils à produire du sens avec les NSQ ?
Ginzburg et Kolliakou considèrent l’explication pragmatique pas suffisante, ils veulent démontrer la nécessité d’une explication mécaniste
(16a) Contexte déclencheur des NSQ : il est en général différent de celui utilisé par les adultes
(16b) l’enfant élabore des requêtes en utilisant des constructions non elliptiques
Nous avons 6 types de
données différentes dans un premier temps, avec comme acteurs Aran, Becky et
leurs mères respectives ; dans chaque cas, l’enfant répond aux questions
de sa mère.
Aran : NSQ potentielles mais non
réalisées
Becky : NSQ non potentielles, ambigües
Résultat : Aran évite de produire des NSQ, Becky a maîtrisé la production des NSQ mais échoue dans leur construction
Nous avons 6 autres types de données, mettant cette fois-ci en scène Carl et Dominic
Carl : What, Where, Yes
Dominic : What ?, What
Désirabilité sémantique : les NSQ doivent être quelque chose que les enfants devraient avoir le désir de produire
Productions plus tardives : production significative de NSQ chez Aran ainsi que chez Becky
Becky : What, Why
Absence totale d’ellipse de clarification (clarification ellipsis, CE) chez les deux enfants
Absence de NSQ en début de production : compétence insuffisamment développée
Résultats du test du chi deux et données des probabilités :
Aran : chi deux=1.6 ; p=0.1 ; p=0.18
Becky : chi deux=0.98 ; p=0.16 ; p=0.31
Distribution des phrases verbales et averbales dans le tableau
Emergence des NSU en grec : autres expériences et corpus avec Mairi et sa mère, choisies parmi 4 enfants grecs et leurs mères respectives
L’émergence tardive des NSU et des questions elliptiques n’est pas due à des facteurs essentiellement linguistiques. C’est tardif aussi dans la production des enfants grecs. L’effet étudié est donc indépendant de la langue.
Tableaux 9 à 12 : cf article ; tableaux 13 et 14 : idem
V – Comment the LATE SHORT QUERY EFFECT peut être modélisé grammaticalement et esquisse d'explication : combinaison de l'accessibilité des paramètres contextuels et la complexité de la construction de contenu.
Tableau 16 : paramètres contextuels
figures 1 et 2 : hiérarchies de types interrogatifs (Ginzburg et Sag)
(29) (30) complexité
tableau 17 : composition sémantique
Explication pragmatique pas suffisante, explication mécaniste nécessaire, nécessité d’utiliser une grammaire orientée dialogue
(24a) grammaire et système contextuels dans lesquels les réponses courtes et les propositions interrogatives verbales coexistent sans NSU
(24b) ordre d’acquisition : explication de l’émergence de NSA avant les NSQ
Description de l’analyse contextuelle et grammaticale, conditions de parallélisme syntaxique et/ ou phonologique
Lexèmes polaires : yes/no
question polaire p ?, dérivée d’une assertion p :
A : did Bo phone ?
B : Yes / No
A : Bo phoned
B : Yes / No
B : Yes / No
? Phone (b,t)
Réponses courtes:
A: who phoned?
B: Bo
lambda x phone(x,t)
Sluicing direct:
A: a student phoned B: who?
? il existe x phone(x,t)
Sluicing en reprise, clarification ellipsis
(ellipse de clarification, CE)
A: did Bo leave?
Lambda x Ask (A,? Leave(x))
Cette interprétation sémantique est résumée dans les tableaux 15 et 16
Hiérarchie des types interrogatifs (figure 1), hiérarchie des NSU (figure 2)
Spécification d’une grammaire et d’un système contextuels dans lesquels les réponses courtes et les
interrogations verbales coexistent sans les NSQ
Ordre d’acquisition des NSU : NSA émergent avant NSQ
Complexité sémantique et contextuelle
CE > sluicing > yes/no > réponses courtes (Aran et sa mère)
CE > yes/no > sluicing > réponses courtes (Becky et sa mère)
Mère de Becky : 20 NSQ par conversation dont 14 CE
Mère d’Aran : 18 NSQ dont 10 CE
Complexité de composition sémantique : c’est la complexité des opérations sémantiques utilisées pour construire le corpus ; nécessité d’utiliser aussi l’accessibilité contextuelle
(29) C1 < C2 si et seulement si C1 a un background contextuel plus simple que C2 OU C1 et C2 ont des backgrounds contextuels équivalents mais la combinatoire de C1 est plus simple que celle de C2
Composition des différentes complexités : elles contiennent les éléments suivants
*application de fonction
*lambda abstraction
*extraction de proposition
*substitution
*négation
*questions polaires
Tableau 17 : complexités différentes associées aux diverses classes de NSU considérées
(30) Réponses
non-verbales < questions non-verbales
Tableaux 15 et 16 : interprétation sémantique
Tableaux 15 et 16 : interprétation sémantique
Tableau 17 : différentes
complexités
VI : Conclusion
Nous avons démontré l’existence du Late Short Query Effect (Effet réponses courtes tardives) et avons précisé l’importance de l’étude du contexte et de la désirabilité sémantique. Les données sont bien valables aussi bien en anglais qu’en grec, ce qui prouve l’indépendance de ce phénomène aux variables dépendant de la langue étudiée. Nous avons utilisé une approche grammaticale qui intègre les informations phonologiques, syntaxiques et sémantiques et avons combiné l’accessibilité aux paramètres contextuels et l’étude de la complexité sémantique.
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