Petit texte lu en introduction à l'hommage à Paul Braffort, Bibliothèque de l'Arsenal, 18 juin 2018.
Paul est décédé le 4 mai 2018, à l'âge de 94 ans.
"J'ai connu Paul Braffort il y a une dizaine d'années lors d'une conférence sur les mathématiques à l'E.N.S. de la rue d'Ulm. A la fin de la conférence, je donne mon nom et je prends la parole. Un vieux monsieur me tape alors sur l'épaule et me demande si je connais les Koechlin. Je lui dis que je les connais bien, puisque ce sont mes cousins.
En fait, Paul avait été le collègue d'Yves Koechlin, qui était le mari de ma cousine Noémie, au C.E.A., à partir des années cinquante. Ensuite il m'a parlé de sa double formation en maths et en philo, et nous avons sympathisé. Il avait dans sa bibliothèque des livres de mon grand-père, Paul Langevin, et avait assisté à ses dernières interventions publiques, après la guerre. J'ai donc rendu visite à Paul régulièrement, pendant une dizaine d'années, dans son petit appartement du Marais.
Je découvrais petit à petit un homme très gentil, derrière une façade un peu bourrue, un surdoué aux multiples talents, qui avait touché à de nombreux domaines et n'avait peut-être pas acquis la notoriété qu'il aurait méritée, même si ses diverses capacités étaient reconnues. Paul était un homme de cœur, un chanteur de talent, un scientifique aux connaissances encyclopédiques et un écrivain bourré d'idées.
Sur ses dernières années, il était capable de passer des journées entières à peaufiner des articles remplis de références scientifiques et culturelles, malgré une forme légère de la maladie de Parkinson, qui lui rendait la marche de plus en plus difficile, et par conséquent la vie de plus en plus sédentaire. Il était d'une grande générosité avec ses amis et adorait sa famille, dont il parlait beaucoup. Ensemble, nous parlions de choses aussi diverses que de chanson, de littérature, de philo, de mathématiques et de sciences.
Paul était un bon vivant, dont les chansons étaient pleines d'anecdotes en tous genres, et d'une certaine sagesse acquise au fil des ans. Il aimait déguster, en plein été, un bon jus de fruit frais ou un petit verre de rosé, en discutant de mécanique quantique ou des dernières parutions de l'Oulipo. Il aimait parler de son ancien séjour à Chicago, était très fier de sa fille informaticienne, et avait même eu des responsabilités politiques au niveau local, ce que je n'ai appris qu'après sa mort, sur internet.
La dernière fois que j'ai vu Paul, nous avons dégusté une coupe de champagne ensemble, le 31 décembre 2017, en trinquant à l'année nouvelle.
Depuis le 4 mai 2018, et dorénavant, il sera excusé de son absence, par ses camarades de l'Oulipo, pour cause de décès.
Bonne route, vieux camarade."
Paul-Eric Langevin, Bibliothèque de l'Arsenal, 18 juin 2018.
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