Rue des Boulangers, Paris, 8 janvier
2020
Paul-Eric Langevin : Noémie, ton grand-père paternel,
c’était Paul Langevin, comme moi. Et ton grand-père maternel, c’était Jules
Grandjouan, et tu as publié neuf volumes d’archives de Grandjouan.
Noémie Koechlin : Oui, c’était un dessinateur et
il a eu toute sa vie une production très abondante, il dessinait vite et
bien.
PEL :
Et toi, tu étais proche de lui quand tu étais petite.
NK :
On était très proches de lui parce qu’il habitait aux environs de Paris, il
avait un grand jardin, et moi et mon frère aîné, Bernard Langevin (Tiapa), on a
très souvent été avec lui passer le week-end, très souvent, c’était inespéré.
Donc j’ai fait neuf fascicules, par thèmes, comme il avait une production très
variée de dessins, j’ai fait un thème sur ses dessins de la ville de Nantes, il
était nantais.
PEL :
Il était né à Nantes ?
NK :
Il était né à Nantes et il a vécu, disons, les deux tiers de sa vie à
Nantes.
PEL :
Il était né à Nantes dans une famille bourgeoise.
NK :
Tout à fait bourgeoise et conventionnelle.
PEL :
Et il avait fait du droit.
NK :
Ah non, il avait fait semblant de faire du droit, c’est-à-dire qu’il avait
effectivement été inscrit à la Faculté de droit, à Paris, mais je crois qu’il
n’a pas dû y rester très longtemps parce qu’il aimait beaucoup mieux dessiner,
et heureusement parce qu’il dessinait beaucoup mieux qu’il ne faisait du droit.
Et il a dessiné plutôt que de faire des études de droit, et c’est très bien.
PEL :
Il a été politisé très tôt ?
NK :
Oui, il a été politisé très tôt.
PEL :
Et j’ai vu qu’il avait perdu son père très jeune.
NK :
Oui, il a perdu son père, il avait sept ans, et il a été élevé par trois femmes,
sa mère, sa grand-mère et son arrière-grand-mère. Il avait quand même son
grand-père, Félix Chatelier, qui était coutelier de la marine et horticulteur
amateur.
PEL :
Comment se fait-il qu’il ait été politisé très tôt ?
NK :
Parce qu’à Nantes, dans les années 1900, il y avait des groupes politiques très
actifs, il a été mêlé aux histoires de Jules Guesde, les guesdistes à Nantes,
et après il s’intéressait à la politique. Donc au début, il était très à
gauche, en fait il était complètement anarchiste.
PEL :
Si j’ai bien compris, il a été d’abord anarchiste, ensuite communiste et
socialiste.
NK :
Non, il n’a jamais été communiste, il a fait des affiches pour le Parti
Communiste, mais il n’a jamais été communiste.
PEL :
Il n’était pas encarté.
NK :
Ah non, ça jamais de la vie, Grandjouan, jamais.
PEL :
C’était, comme Paul Langevin, un compagnon de route du Parti Communiste.
NK :
Oui, il était très actif mais pas du tout encarté, ça pas du tout. C’était un
homme beaucoup trop indépendant. Mais c’était quand même un homme très
politisé.
PEL :
Comment il vous parlait de tout ça quand vous étiez petits ?
NK :
Ah bien, nous, quand on était petits, il ne nous parlait pas de politique, non
quand on était petits, il nous racontait des histoires, et en particulier, je
me souviens toujours qu’il nous racontait les mille et une nuits, à sa façon,
et il nous racontait ça le soir tard parce que quand on allait chez lui aux
environs de Paris, on faisait tout ce qui était défendu chez mes parents, on se
couchait tard, on se levait tard, enfin bon, c’était merveilleux. Et il nous
emmenait aux ventes aux enchères, il nous emmenait fouiller dans les décharges,
parce qu’il trouvait toujours des trucs formidables. Il nous emmenait aussi,
pour trouver des fossiles. Il avait l’œil, dès qu’on se promenait quelque part,
il trouvait quelque chose d’intéressant.
PEL :
Il s’intéressait à tout.
NK :
Oui effectivement, il s’intéressait à tout, c’était un homme universel.
PEL :
Et il n’a pas fait des études de dessin, il a appris tout seul.
NK :
Ah si, il a quand même été un peu aux Beaux-Arts, au lieu d’aller faire son
droit à Paris, il est allé un peu aux Beaux-Arts, mais effectivement pas
longtemps. Il a appris à dessiner tout seul. Et il faut dire qu’il était
relativement doué, parce que j’ai deux dessins de lui à quinze ans, à quinze
ans déjà, il a fait un portrait de sa mère, et un autoportrait, absolument
épatants, déjà à quinze ans. Ah oui, il était très doué.
PEL :
Et il a commencé à faire des dessins engagés à quel âge.
NK :
Très tôt. Dix-neuf ou vingt ans.
PEL :
C’était en relation avec son activité, son engagement ?
NK :
Oui, mais disons qu’avant de faire des affiches, parce qu’il a fait pas mal
d’affiches, avant de faire des affiches politiques, il a fait des affiches,
comment dirais-je, commerciales, alimentaires, il en a fait trois ou quatre.
Mais c’est quand même lui qui est le précurseur de l’affiche politique
illustrée, parce que les affiches politiques, il y en avait plein, mais il n’y
avait pas de dessins. Et Grandjouan a commencé à faire des affiches avec des
dessins. C’est lui, vraiment, le précurseur de ce genre de chose.
PEL :
Donc c’est là qu’il a commencé à illustrer « L’assiette au beurre »
et « Le rire ».
NK :
Alors il a signé dans l’Assiette au beurre pendant les dix ans qu’a duré
l’Assiette au beurre. Il a écrit dans le premier numéro et jusqu’au dernier
numéro. Il faut dire qu’il a fait plus de mille dessins dans l’Assiette au
beurre. C’était un dessinateur très prolifique.
PEL :
Ah tu vois, il y a quand même un numéro qui s’appelle inventaire. Et ça, c’est
les portraits de famille.
NK :
Oui, c’est les portraits de famille, tout ça.
PEL :
Et alors, à partir d’un moment, il s’est mis au service du PCF. Il a
commencé à dessiner pour le PCF. D’ailleurs, le PCF, ça date de 1920.
NK :
Oui mais il n’a pas été au service de, il a fait quelques affiches pour les
communistes, il a fait des affiches un peu anarchisantes, mais il n’a jamais
été au Parti Communiste, ni à aucun autre parti, parce que ce n’était pas du
tout un homme de parti. Il n’a jamais été au Parti Communiste, mais il a fait
des affiches pour eux, ça c’est sûr.
PEL :
En fait, si j’ai bien compris, en lisant des résumés, il essayait, d’un point
de vue personnel comme public, de réunir des forces de gauche un peu
hétéroclites, les anarchistes, les libertaires, les communistes.
NK :
Il était même tout à fait anarchiste, si tu veux, il était anarchiste de
pensée, mais il n’avait pas une activité politique énorme, il n’allait pas
faire des conférences dans les réunions, il dessinait, en fait c’était un
dessinateur.
PEL :
Oui, il s’exprimait comme ça.
NK :
D’ailleurs, heureusement qu’il dessinait parce que ses écrits ne sont pas
extraordinaires. Tout ça, c’est donc les portraits de famille que j’ai réunis
en allant partout dans la famille voir ce qui restait. Il a fait quelques autoportraits.
Ah voilà, ces deux-là, si tu veux, si ça t’intéresse, je peux t’en donner un
puisque j’en ai deux.
PEL :
Oui, c’est comme tu veux.
NK :
Je peux te faire refaire les autres.
PEL :
Là, il y a un gros volume sur les dessins de presse.
NK :
C’était un dessinateur de presse très prolifique.
PEL :
Antimilitariste, anticlérical et antipatriotique.
NK :
Anti patrons, anti partis, anticlérical.
PEL :
Alors là, sur la couverture, on voit des gens qui crachent sur un militaire.
NK :
Il a écrit dans des tas de journaux.
PEL :
Récapitulatif de la presse.
NK :
Il a écrit dans une soixantaine de journaux, et en particulier dans l’Assiette
au beurre. Il a fait à peu près mille dessins dans l’Assiette au beurre, comme
je te dis. Et puis le Rire.
PEL :
La Revue nantaise, la Révolution, le Réveil social, la Raison, le Populaire.
C’est une production énorme. Il a dessiné toute sa vie en fait.
NK :
Toute sa vie, et sur n’importe quoi. On apportait un paquet de jambon, il nous
expliquait, il parlait en dessinant, il dessinait sur le papier de jambon, tu
vois. Il n’était pas soigneux, et ça c’était le drame. Heureusement que ma mère
était soigneuse et qu’elle a conservé beaucoup de ses dessins qui auraient été
perdus sans ça, parce que lui n’était pas soigneux. Il dessinait vite, bien et
sur n’importe quoi. C’est terrible.
PEL :
Et alors, il a eu trois enfants avec Bettina Simon : Edwige, Jacques et
Henri. Et sa fille, Edwige Grandjouan, ta maman, a épousé Jean Langevin et est
devenue Vige Langevin.
NK :
Ah alors, ma maman, elle a été professeur de dessin, il lui a appris à
dessiner, il a aussi appris à dessiner à mon oncle Jacques, qui était dessinateur
animalier, il a appris à dessiner à ses enfants, ça c’est sûr. Heureusement.
PEL :
Alors est-ce que tu peux me parler un peu de son fils Jacques ?
NK :
Alors Jacques-Olivier Grandjouan, il était grammairien, il était intellectuel
littéraire, c’était un littéraire complet. Alors, comme métier, il a été
censeur des lycées français dans les ex colonies, au Maroc, au Liban, il a été
aux Antilles, alors il était proviseur de lycée, les lycées français, et en
plus, il était un des grands promoteurs du scoutisme en France, et il a
organisé des quantités de camps de scouts dans tous les endroits où il était,
aussi bien au Maroc, qu’au Liban, que partout.
PEL :
Et vous, enfants, vous étiez scouts ou pas ?
NK :
Ben non, mes parents n’étaient pas tellement pour qu’on soit scouts, et moi je
mourais d’envie mais mes parents n’ont pas accepté.
PEL :
Et ses enfants à lui ?
NK :
Ah oui bien sûr, il a eu deux filles.
PEL :
Et je reviens là-dessus, Grandjouan avait mis ses enfants à l’Ecole de la
Ruche, qui était une école libertaire, créée par Sébastien Faure.
NK :
C’est ça, voilà, ils y ont été, je le sais, pas longtemps parce qu’après, ils
ont été au lycée, je le sais. Ils ont eu une éducation tout ce qu’il y a de
plus normal. Alors que les enfants de mon oncle Jacques n’ont pas été au lycée.
Mon oncle leur a enseigné lui-même, ses deux filles. Oui, ça, c’est tout à fait
étonnant.
PEL :
Il leur apprenait tout, quoi.
NK :
Oui, il leur apprenait tout. L’une de ses filles est devenue archéologue,
elle était très connue en Amérique, et l’autre, alors non, elle est toujours
vivante et elle est mariée à un kenyen. Elle vit au Kenya.
PEL :
Ah oui, donc aussi les pays chauds.
NK :
Oui, c’est ça, c’est-à-dire qu’elle a rencontré ce kenyen, qui est extrêmement
bien, un scientifique, à l’Université à New-York, et comme elle est tombée
amoureuse de lui, mon oncle lui a dit, un mariage mixte, une blanche et un
noir, ne vivez pas en Amérique, à l’époque, allez plutôt vivre au Kenya. Et
effectivement, au Kenya, ils ont eu une vie très facile, lui tu penses,
physicien, qui est arrivé au Kenya, aussitôt on l’a nommé directeur
d’université. Et il a été journaliste international. Le mari de ma cousine
Fleur. Il s’appelle Hilary Ngweno. Il a été un grand journaliste là-bas, il a
fondé un journal et une émission de télévision.
PEL :
Et concernant Henri Grandjouan ? Il était ingénieur ?
NK :
Henri a fait l’Ecole des Mines, il est devenu ingénieur, et c’est lui qui s’est
occupé au départ de la pose de câbles entre la France et l’Amérique. Il a été
ingénieur des Ponts et Chaussées, et il était à l’Ecole des Mines, au départ.
PEL :
Il a fait beaucoup de choses dans sa vie ?
NK :
Ben oui, il est devenu ingénieur des mines, alors il s’est occupé de la pose de
câbles dans l’Atlantique comme je te dis, qu’est-ce qu’il a fait d’autre ?
Je ne sais pas. En tous cas, c’était un navigateur et un marin pêcheur de
prédilection, il n’avait qu’une idée, c’était de pouvoir s’acheter un bateau et
d’aller à la pêche en Bretagne. Dès qu’il a pu s’acheter un bateau, il l’a
fait.
PEL :
Alors revenons un peu à Jules Grandjouan. Donc il dessine dans l’Assiette au
beurre, dans le Rire, dans plusieurs autres revues, il fait des dessins pour
les communistes mais sans être inscrit au Parti, il a été en Russie.
NK :
Il a été en Russie deux fois dans sa vie. La première fois, c’était au moment
de la rencontre entre le Président de la République et le Tsar de Russie,
c’était en 1901 je crois, et la deuxième fois en 1926, et à la suite de cette
visite en Russie, où il est resté six mois, il a écrit un livre qui s’appelle
« La Russie vivante », je ne sais pas si je te l’ai montré, je vais
te le montrer, je n’en ai malheureusement qu’un exemplaire.
PEL :
C’était quelques années après la Révolution de 1917, ah oui c’était l’anniversaire
des dix ans de la Révolution de 1917.
NK :
Oui, de 1917, et il est dithyrambique, il dit tout n’est pas parfait mais ça le
sera bientôt, il est très enthousiaste et très optimiste. Je vais te montrer ce
livre sur la Russie vivante.
PEL :
Et son optimisme s’est modifié par la suite ?
NK :
Non, il n’a jamais abandonné son optimisme, ça c’est extraordinaire.
PEL :
Non mais je veux dire son optimisme politique.
NK :
Ben politiquement, il n’était inscrit à aucun parti, bien entendu, il n’était
pas anarchiste pour rien, mais il était très optimiste en ce qui concerne la
Russie. Je vais te montrer ça.
PEL :
Donc le journal « La Russie vivante », par Grandjouan : les
ouvriers délégués du monde entier, les soirs de congrès, un document exact sur
l’époque présente, à conserver en prévision des temps futurs, édition populaire
et première à dix francs, se trouve aux amitiés franco-soviétiques.
NK :
La Russie vivante, ce n’est pas n’importe quoi. Il a une centaine de dessins
dedans.
PEL :
Et pendant la guerre, il se retire à la campagne, c’est ça ?
NK :
Oui, alors pendant la guerre, il a fait son retour à la terre, il a loué les
communs d’une grande propriété au nord de Nantes, à la Boissière, et il a
cultivé la terre, un petit peu, et puis il a élevé une vache je crois, et une
chèvre. Alors il était dans les communs de cette ferme, et il y avait une
petite chapelle, et c’est là qu’il a mis sa vache. C’est Grandjouan.
PEL :
Ah oui c’est beau, cette revue.
NK :
Oui c’est plein de dessins, il doit y en avoir une centaine. Il a passé six
mois en Russie.
PEL :
Et Paul Langevin a été plusieurs fois en Russie aussi.
NK :
Oui, mais il n’y a pas été en séjour comme Grandjouan, Grandjouan y a passé six
mois.
PEL :
Il était où ?
NK :
Il a été à Moscou, il a été à Kiev, il a voyagé.
PEL :
J’ai un ami qui a été l’année dernière à Khabarovsk, c’est de l’autre côté à
dix mille kilomètres. Kiev, c’est en Ukraine, alors à l’époque, ça devait être
en Russie. Donc il revient de Russie enthousiaste.
NK :
Extrêmement enthousiaste. Et il écrit ça.
PEL :
Et alors, après la guerre ?
NK :
Après la guerre, il est retourné à Nantes, il est resté à Nantes, il est pas
revenu dans les environs de Paris, et il a un peu dessiné, sa mère était
propriétaire de plusieurs maisons à Nantes, elle vivait de ses loyers, et alors
quand elle est morte, c’est Grandjouan qui a hérité de ses maisons, c’est de ça
qu’il vivait, Grandjouan, parce qu’il ne dessinait plus beaucoup pour la
presse.
PEL :
Et il s’était présenté à un moment donné aux municipales.
NK :
Oui c’est ça, mais sans aucun succès, non, il a abandonné, il n’avait aucune
raison d’avoir du succès, parce que Grandjouan était comme ça.
PEL :
Mais du coup, il a laissé son engagement politique après.
NK :
Ben tu sais, il devenait vieux, il est quand même né en 1875, la même année que
ma grand-mère, Bettina Simon, d’ailleurs.
PEL :
Mais ça reste quand même pour pas mal de gens, dans les milieux libertaires et
anarchistes, une image importante.
NK :
Oui, Grandjouan, bien sûr. D’abord, il a peu écrit mais il a un peu écrit quand
même, et surtout par ses dessins. Il valait mieux qu’il dessine, parce qu’il
faisait ça très bien, tandis que le reste, il le faisait moins bien. Il
dessinait merveilleusement, et ce qui était étonnant, c’était la vitesse à laquelle
il saisissait le détail caractéristique du dessin. Il avait un don
extraordinaire pour la ressemblance. C’était effectivement une grande qualité. Il
dessinait partout, sur les murs, sur les papiers qui traînaient, pour trouver
et pour récolter tous ses dessins, il aurait vraiment fallu fouiller partout.
Et quand il nous racontait une histoire, à nous les petits, il avait toujours
un papier et un crayon, ou alors de la pâte à modeler, il fallait le voir, il
modelait immédiatement le personnage qu’il était en train de décrire. C’était
fabuleux.
PEL :
Et donc, il disait ce fameux conseil, un dessin par jour.
NK :
Oui, pas un jour sans un dessin. Il disait si tu veux t’exprimer par le dessin,
c’est à ce prix-là. Il avait tout à fait raison.
PEL :
Et vous trois, vous en avez profité.
NK :
Ah ben moi, j’ai beaucoup dessiné pour mon plaisir et surtout pour mon métier.
J’ai beaucoup dessiné au tableau, j’ai beaucoup dessiné sur le papier.
PEL :
Pour la biologie.
NK :
Et mon petit frère, Sylvestre Langevin, qui est architecte naval, il a appris à
dessiner aussi. Il faut dire que ma mère, qui était professeur de dessin, nous
a appris à dessiner, elle nous faisait dessiner.
PEL :
Elle a fait des choses pour l’Unesco.
NK :
Non, pas beaucoup, mais elle a fait des dessins, elle a fait des expositions.
Au départ, dans la jeunesse de ma mère, elle faisait des peintures à l’huile.
Elle a des tableaux qui sont absolument merveilleux. Et puis ensuite, elle a
dessiné. Elle a fondé un petit journal pour enfants avec d’autres dessinateurs.
Elle était professeur, elle dessinait tout le temps. Elle dessinait vraiment
très facilement, ma mère. Il faut dire que mon grand-père avait fait ce qu’il
fallait. Parce qu’elle dessinait, et son frère, Jacques-Olivier Grandjouan,
dessinait très bien aussi.
PEL :
Et Henri aussi peut-être.
NK :
Henri dessinait moins, de par son métier d’abord, et puis il était moins enclin
à dessiner. Mais ma mère et mon oncle Jacques dessinaient beaucoup et très
bien. Et ça a été prolongé dans la famille, si tu veux, par mon petit
frère et moi, qui avons dessiné pour notre métier.
PEL :
Et les dernières années, Grandjouan était à Nantes.
NK :
Alors il a passé, depuis la guerre, jusqu’à la fin de ses jours, en 1968, il a
vécu à Nantes.
PEL :
Vous le voyiez encore à cette période.
NK :
Bien sûr. On allait le voir, d’abord, et ensuite il venait à Paris, et quand il
venait à Paris, il venait chez moi. C’était chez moi qu’il habitait.
PEL :
Chez Yves et toi.
NK :
Oui, bien sûr. Il venait chez nous. Il aimait beaucoup ses petits-enfants.
Il s’est beaucoup occupé de ses petits-enfants. C’était un grand-père idéal.
PEL :
Il est mort âgé.
NK :
En 1968, à 92 ans. Il a eu une fin de vie assez difficile parce qu’il est
devenu aveugle. Pour un peintre ou un dessinateur, c’est un peu triste.
PEL :
C’est un peu comme Monet, il avait trop utilisé ses yeux.
NK :
Oui, il est devenu aveugle et il est mort en 1968.
PEL :
Les dernières années, il était aveugle.
NK :
Oui, il était aveugle, il voyait de moins en moins bien, et à la fin, il a
quand même eu beaucoup de mal à survivre. C’était un grand-père merveilleux.
PEL :
Moi, j’avais écouté l’émission dans laquelle on t’avait interrogée sur Radio
Libertaire, et ça, ça fait un petit complément.
NK :
Oui, je me souviens.
PEL :
Voilà, merci.
NK :
Je t’en prie.
Noémie Koechlin est professeur de biologie retraitée, spécialiste
en biologie marine. Elle a enseigné à l’Université Pierre-et-Marie-Curie et a
été chercheuse au sein de l’Institut de chimie des substances naturelles (ICSN)
de Gif-sur-Yvette.
Elle a passé une dizaine d’années à rééditer les œuvres complètes
de son grand-père maternel, le dessinateur anarchiste libertaire Jules
Grandjouan. Cette réédition comporte neuf tomes :
1)
Inventaire
2)
Portraits de famille
3)
Les ouvriers et les métiers
4)
Vendée et Bretagne
5)
Nantes
6)
Jules Grandjouan affichiste
7)
Isadora Duncan, l’Egypte et Venise
8)
Dessins et légendes dans l’Assiette au beurre
9) Jules Grandjouan, dessinateur de presse et illustrateur
Jules Grandjouan (1875-1968)
Jules Grandjouan sur Wikipedia: https://fr.wikipedia.org/wiki/Jules_Grandjouan
Jules Grandjouan sur le Maitron: http://maitron-en-ligne.univ-paris1.fr/spip.php?article155015
Introduction de "Jules Grandjouan affichiste":